Ces femmes ne savent pas leur beauté : photographies de femmes : Afrique, Algérie, Antilles, Indochine, Madagascar, Océanie, 1892-1962

Recension rédigée par Josette Rivallain


            Isabelle Dion, responsable du département iconographie aux Archives nationales d’outre-mer présente ici une sélection de dizaines de photographies, retenues parmi 140.000 clichés, dédiées aux femmes et conservées dans le fonds des ANOM. Y sont conservés des plaques de verre, des négatifs, des positifs, des négatifs souples, des cyanotypes, des épreuves albuminées ou argentiques, des aristotypes, des diapositives, l’ensemble couvrant la période 1844-1970. Ce fonds est issu de l’administration coloniale, dont l’Agence économique de la France d’outre-mer, et de fonds privés. Les cartes postales, véhiculant trop de stéréotypes, n’ont pas été retenues.

            Classés par zones géographiques, ces documents restituent l’émotion et la fascination des voyageurs non préparés à leur nouvelle vie ; fascination pour l’image que ces femmes envoient, pour les paysages. Ce sont également des sources documentaires de premier ordre touchant au vêtement, aux parures, et, par voie de conséquence, aux structures de la société. Elles racontent l’habitat, les modes de vie, les activités quotidiennes, et sont très belles.

            La photographie coloniale contemporaine de la deuxième période d’expansion française accompagne les phases de conquête, d’occupation, puis de la mise en valeur des nouveaux territoires. Alors, nous sommes en pleine période de recherche d’exotisme, largement exploité par revues et journaux qui en publient des illustrations. Ces photographies ne sont pas toujours associées au nom de leur auteur, et, quand il est nommé, il s’agit souvent d’officiers, d’administrateurs, d’instituteurs, de membres de la Société de géographie de Paris, ou de missions chargées de délimiter les frontières.

            La photographie est en soi un document qui, d’un coup d’œil, rend compte de multiples réalités, que l’écrit ne sait pas rendre, bien sûr, à la condition de connaître les circonstances de la prise de vue. A l’époque, la femme des colonies ne faisait pas l’objet de témoignages particuliers et beaucoup de voyageurs la jugeaient laide, y voyant de préférence un être habitué aux lourds labeurs, mais le regard n’a pas été identique dans tous les territoires. Coiffures, bijoux, tatouages ont beaucoup attiré le regard des photographes en Afrique noire tant occidentale que centrale, zones où les femmes vivent largement hors des murs de leurs habitations. En Algérie, le problème fut autre, les femmes ne se montrant pas et ne se dévoilant pas. Pour ce pays, l’auteur a surtout retenu le travail de D. Dubois qui photographia des femmes algériennes réfugiées en Tunisie. Là, les lieux sont rarement identifiables, les légendes mentionnant avant tout l’origine ethnique de la femme photographiée.

            Les femmes des Iles sont diversement prises en compte : inexistantes pour la Réunion, Saint-Pierre-et-Miquelon, contrairement à celles de la Polynésie, dont H. Lemasson, receveur des Postes, a fixé la pose ou de la Martinique et de la Guadeloupe, illustrant également les conditions de vie.

            En Indochine, les premiers voyageurs ont surtout photographié villes et monuments. Une part des prises de vue est due au chef du service cinéphotographique de l’Indochine, chargé par le ministre Albert Sarrault de prendre des vues relatives aux ressources économiques, ethniques afin de mieux connaître le pays et ses possibilités. Le costume, la coiffure, les bijoux ont alors été privilégiés, associés au nom de la région de la prise de vue. En grande part, Madagascar est vue à travers les photographies prises à l’occasion du recensement de la population, selon les directives du général Gallieni, entre 1896 et 1905, classées par circonscriptions. Ces vues sont un peu figées, mais mettent en valeur vêtements et coiffures.                                                                                                  

 



 
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