Auteur | sous la direction de Pascal Bruckner et Michel Gad Wolkowicz |
Editeur | David Reinharc |
Date | 2025 |
Pages | 282 |
Sujets | Sansal, Boualem (1949-....) Sansal, Affaire Politique et littérature 2000-.... Sansal, Boualem (1949-....) Emprisonnement Algérie 2000-.... |
Cote | 69.572 |
Cet ouvrage nous permet de prendre connaissance de l’œuvre de Boualem Sansal, de son combat pour la liberté de l’esprit et des difficiles relations entre son pays de naissance et celui qu’il a adopté.
Les auteurs évoquent sa biographie et son œuvre. L’arrestation de B.S. le 16 novembre 2024 laisse augurer du pire, écrivain de 76 ans, lauréat du Prix de l’Académie Française en 2015. D’origine marocaine par son père, il a reçu une formation d’ingénieur et d’économiste. Un temps haut fonctionnaire en Algérie, il a été renvoyé de son poste après la publication d’un roman, Dis-moi le paradis, très critique à l’égard du pouvoir algérien et des islamistes (Bruckner p.22). Dans ses livres, il a peint les ombres pour mieux révéler la lumière. Le nom de B.S. résonne dans nos cœurs come une promesse (Bencheikh p.171). Son œuvre est un lien dédié à l’intelligence (L. Romain p.232). Grâce à B.S., on constate que la littérature n’a rien perdu de son pouvoir critique mais qu’elle œuvre au dévoilement de vérités latentes et refoulées (Szlamowicz p.246).
B.S. est une source d’inspiration pour ceux qui prônent le dialogue » (El Haïté p.251). Pour aider un écrivain emprisonné par un pouvoir, il n’y a qu’une chose à faire : le lire (S. Tesson p.253)
Sa quête de liberté religieuse est analysée. Un homme profondément courageux et doux, un ancien hippie, ni dieu ni maître, Sansal sait quels massacres accompagnent toute poussée victorieuse de l’islam radical (Reinharc p.18). Dans Gouverner au nom d’Allah, il dénonçait vigoureusement le silence des intellectuels musulmans (Reinharc p.19). Boualem Sansal est au monde musulman ce que Voltaire fut au monde chrétien. B.S. pourfend les cagots, les bigots, les calotins de l’intifada française (Onfray p.66). B.S. appelle à une vigilance constante et à une résistance active face aux forces qui cherchent à asservir les esprits (Lisnard p.78).En hommage à Orwell, B.S. publie 2084 La fin du monde qui nous met en garde contre le fanatisme islamiste (Lisnard p.78).La faute de B.S. serait d’utiliser sa voix pour nous avertir de la nature des menaces et des stratégies de l’entrisme islamiste (Wolkowicz p.27). B.S. est un homme doux dont la parole est discrète. Il est tout sauf l’activiste enragé que ses détracteurs ont voulu voir en lui, cette caricature infamante forgée par les chiens de garde de l’islamisme et du régime algérien. Sa naïveté m’a le plus touché chez lui, une figure de l’innocence dans un monde de loups (Prazan p.206). B.S. incarne la résistance intellectuelle et morale la plus courageuse face à l’islamisme radical et à la bien-pensance face aux régimes répressifs (del Valle p.141).
Ce n’est pas seulement B.S. qui est pris en otage, c’est la France (Attal p.96).
Ces dernières années, il n’a cessé d’interpeller les Français sur les dangers du renoncement et de la compromission. La libération de notre ami B.S représente un enjeu capital pour notre démocratie (Montbrial et L. Fatimi p.223). Pour B.S. le drame, ce n’est pas seulement d’être à genoux, c’est d’oublier qu’on est à genoux. B.S. aime la France, il la connait, la comprend et ne peut consentir à la voir signer la reddition avec elle-même (Levet p.241). B.S. est plus inquiet pour la France que pour l’Algérie. Son arrestation n’a pas étouffé sa voix, elle l’a amplifiée (Sifaoui p.43). Quand un régime devient le maître du souffle d’un écrivain, c’est notre humanité qui retourne à son chaos. Notre histoire est devenue un devoir : libérer Boualem Sansal (Khan p 149). Il faut libérer Sansal pour lui et pour tous les autres, y compris pour nous autres et nos prochains (Benedetti, fondateur du Comité de Soutien pour B.S. p.175). B.S., otage d’un chantage qu’il a toujours dénoncé, a emprunté ce chemin commun entre la France et l’Algérie, lui, en qui se conjugue le meilleur des deux rives de la Méditerranée (Retailleau p.33). La liberté pour B.S. est l’affaire des Algériens. Elle est aussi la nôtre. Sa liberté est l’affaire de ceux qui veulent rester libres (Tarnero p.222). Boualem Sansal devient l’étendard de tous ceux qui résistent à l’autoritarisme sous toutes ses formes (Fregosi p.134).
Daoud et Sansal, qui apparaitront comme les Voltaire et Diderot de notre époque (Blanquer p.70) incarnent ce qu’il y a de pire dans leur société d’origine, la liberté de penser. Ils trahissent leur identité arabo-musulmane et leur pays d’origine en prenant le parti des libertés de conscience (Laacher, P.186). B.S. et Kamel Daoud « trahissent » leur identité arabo-musulmane et leur pays d’origine en prenant le parti de la liberté d’expression » (Valls p.260).
Plusieurs contributaires ont noté la réticence de la Gauche française à soutenir B.S. Il est honteux que nous ne soyons pas plus nombreux à descendre dans l’arène pour défendre B.S. contre ceux qui veulent éliminer les combattants de la liberté (Schnapper p.192). La réticence de la gauche de prendre sa défense vient de ce que l’œuvre littéraire exhibe un réel que cette gauche se refuse à examiner, craignant que son esprit critique éloigne ses électeurs et fasse le jeu des adversaires (Redeker p.62). L’engagement pour Sansal reste faible à gauche (Binhas p.86). Quatre eurodéputés français dont Rima Hassan, ont voté contre la Résolution de demande de libération de B.S., au Parlement Européen qui a été adoptée par 533 voix sur 605 présents le 25 janvier 2025 (Enthoven p.129). L’Assemblée nationale française (5 février 2025) et 120 Sénateurs réunis par la Président Larcher le 29 janvier 2025 ont voté également une Résolution de demande de libération de l’écrivain (Lenoir p.161). Ce qui est inquiétant, c’est que la dictature d’Alger ait trouvé en France tant d’alliés pour tenter d’étouffer le scandale de l’emprisonnement arbitraire de Sansal (Benamou p.136).
Cet ouvrage nous permet également de nous pencher sur le régime islamo-militariste algérien, si décrié par l’auteur du Serment des Barbares.
L’Algérie des généraux se nourrit du pétrole et du ressentiment qu’ils prennent pour une énergie renouvelable (Blanquer p70). Ce régime, flanqué de sa camarilla islamiste, interdit toute velléité d’examen critique (Sifaoui p.45).
L’appareil militaire sécuritaire au pouvoir à Alger depuis l’indépendance vit très confortablement d’une fantastique rente gazière et pétrolière (95% des exportations et 60% des recettes budgétaires (Lellouche 91). B.S. a mis en lumière que ceux qui ont pris le pouvoir dans les années 1960 et qui le détiennent encore ne sont pas ceux qui ont affronté les dangers d’une révolte armée mais ceux qui ont attendu tranquillement en Tunisie pour cueillir le fruit d’un arbre que d’autres avaient arrosé de leur sang (Brague p.94). Les dirigeants algériens ont depuis des décennies mis leur pays en coupe réglée et dont l’admirable Sansal est aujourd’hui l’otage (Prasquier p.109). L’Algérie est un pays immensément riche. Mais sa population est pauvre à cause du parti au pouvoir depuis l’indépendance. Insensiblement, l’Algérie a glissé des séductions de l’Internationale communiste aux terreurs de l’Internationale islamiste » (E.Philippe p.244). B.S. est l’otage d’un régime qui se survit grâce à deux rentes, celle du ressentiment érigé en religion civile aux côtés de l’islam religion d’État et celle de la richesse de son sous-sol (Sarfati p.73).
La France et l’Algérie se trouvent prisonnières d’une dépendance réciproque qui mine toute amitié et décourage toute sincérité. C’est de cet emprisonnement réciproque que B.S. veut nous libérer (Manent p.234). L’alliance tacite entre armée et islamistes a pour but d’éradiquer l’influence de la France (Driencourt, p.50). L’objectif du pouvoir algérien est de garder une société monolithique qui sait ressasser le discours islamo-nationaliste et la haine de la France (Sifaoui p.40). Mais la France est l’adversaire éternel autant qu’indispensable (Bruckner p.24). L’échec du socialisme algérien s’est mesuré longtemps au départ des Algériens vers la France (Binhas p.82). Toute cette nomenklatura vient se faire soigner grâce aux passeports diplomatiques dans le pays qu’elle voue aux gémonies (Finkelkraut p.124). Les dirigeants algériens ont besoin de la France pour écluser le trop plein démographique de leur pays. Ils en ont besoin pour les transferts de fonds. L’Algérie ne peut exister sans la France (Schoettl p.58).
Ce livre du cœur remplit sa mission. Avec Bérénice Levet (p.240), nous savons qu’abandonner Boualem Sansal, c’est abandonner une certaine idée de nous-mêmes.