Auteur | Alain oppolani |
Editeur | Les Belles Lettres |
Date | 2024 |
Pages | 569 |
Sujets | Afghanistan Histoire |
Cote | 69.069 |
Alain Coppolani, ancien militaire des forces spéciales de la Marine Nationale, en mission en Afghanistan, va s’intéresser à ce monde complexe, riche de sa diversité culturelle. Pour cela, l’auteur s’ouvrira aux langues persane, pachto, à l’islamologie, et poursuit actuellement ses recherches dans la sphère de l’Institut national des langues et civilisations orientales (INaLCO) ainsi que par son rattachement au Centre de recherche sur le monde iranien (CeRMI, UMR 8041). Au travers des 569 pages de l’ouvrage, l’auteur souhaite nous faire comprendre comment ce pays, « associé aux attentats, au terrorisme, aux catastrophes naturelles, à la violence de ses gouvernements » reste un pays d’une grande complexité, héritier d’une grande histoire, de relations économiques, souvent pris en otage dans le jeu géopolitique de grandes puissances, britanniques et russes au cours des XIXe et XXe siècles et plus proche de nous des États-Unis ; un pays que Michael Barry, grand connaisseur lui-aussi de ce territoire, traitera voilà près de vingt années, sous les termes du « Royaume de l’Insolence ».
L’ouvrage s’articule autour de sept grandes parties traitant de l’histoire, du territoire et de la société, des systèmes politiques depuis la sortie de la Première guerre mondiale, des religions, de la géopolitique, de l’économie et de la culture. Un texte dense dans lequel le lecteur peut se retrouver grâce à trois index : thématique ainsi que des noms de personnes, de lieux ; cinquante pages de notes infra paginales complètent les enseignements ou l’observation.
Chaque partie est elle-même subdivisée en chapitres, donc chacun aborde un aspect plus spécifique, sorte d’illustration concrète pour comprendre ce pays compliqué et mal connu en Occident.
Après une explication sur l’origine du mot ou du qualificatif « afghan », l’auteur aborde la véritable histoire d’un Afghanistan, pays à part entière, préalablement entité à part entière des grands empires perses, avec l’arrivée au pouvoir de Ahmad Chah Durrani au début du XVIIIe siècle. S’ensuit le défilement des événements heureux et malheureux, des invasions, des conquêtes temporaires qui vont se succéder jusqu’à nos jours. L’Histoire jusqu’à nos jours tient une place spécifique puisque quarante pour cent du texte est consacré à cette approche. L’auteur consacre un chapitre plus particulier pour nous expliquer le système politique régnant en Afghanistan depuis 1919. Un chapitre est consacré aux années du début du XXIe siècle avec la place de l’Afghanistan sur la scène internationale.
Ce n’est pas une encyclopédie au sens stricte car l’auteur privilégie certains aspects qui lui apparaissent comme spécifiques. Ainsi dans le chapitre religion, l’auteur ne propose pas la présentation d’une carte des grandes communautés religieuses qui se répartissent le territoire de nos jours mais préfère nous éclairer sur des aspects peu ou mal connus, d’une mosaÏque, à l’intérieur de laquelle on s’entredéchire : école hanafite, la pensée deobandi dont se réclament les Talibans, le soufisme, la communauté sikhe. L’économie insiste sur les aspects agricoles avec trente pour cent du chapitre. C’est un sujet sur lequel l’auteur a consacré son doctorat mais on y comprend aussi la richesse des ressources minérales et les engagements du pays dans les grands projets de développement contemporain des routes de la soie ou encore celui du gazoduc TAPI, Trans-Afghanistan, ou encore la connexion du Pays avec le nouveau port iranien de Chabahar sur le golfe d’Oman.
Si la culture afghane nous est déjà connue à travers la période du Ghandara que nous ont fait connaitre nos grands savants dont Alfred Foucher fondateur de la Délégation française archéologique d’Afghanistan (DAFA) qui vient de fêter ses cent ans, l’auteur nous explique comment la musique survit entre tradition et répression mais aussi comment l’Afghanistan fut une terre de création cinématographique au cours du XXe siècle.
L’approche de l’auteur se montre positive à contre-courant de la postface de l’ambassadeur Pierre Lafrance qui retient, avec beaucoup d’à-propos, déjà les malheurs de ce pays.
Cet ouvrage est certainement la mise à jour la plus détaillée à ce jour des informations pour qui veut saisir les complexités et les enjeux de l’Afghanistan contemporain qui vient d’entrer dans une nouvelle ère qui ne participe pas à la stabilité du pays, une de plus.