La Révolution française et les colonies

Recension rédigée par Marc Aicardi de Saint-Paul


Marc Belissa est Maître de conférences émérite et Directeur de recherches en histoire moderne à l’Université Paris-Nanterre. Il avait déjà été le coauteur de : « Le Directoire » en 2018 et « Le Consulat de Bonaparte » en 2021.

L’auteur balaye chronologiquement toute cette période révolutionnaire et post révolutionnaire avec application en débutant par ‘La réorganisation de l’empire entre 1763 et 1789, celui des Caraïbes et des iles de l’Océan indien. Il y décrit une société esclavagiste et ségrégationniste, morcelée en « petits Blancs » « grands Blancs » et autres mulâtres et noirs.

Puis il relate le choc représenté par la Révolution, la Déclaration des Droits de l’homme et du citoyen qui, entrainant la « terreur des colons », déboucha sur des troubles dans ces territoires lointains. La transition entre l’ordre ancien et le nouveau ne se fit pas sans à coups, à telle enseigne que la réaction coloniale (1800-1804) ne tarda pas, avec le tournant colonial et esclavagiste pris par Bonaparte.

Le cadre historique planté, l’auteur enchaine, à partir du chapitre V, sur des considérations d’ordre économique (Le commerce, l’Exclusif et l’empire), politique  (Le lien colonial), de société (Le vent commun : circulation des hommes, des écrits et des paroles - Identités coloniales imposées, imaginaires, révolutionnées - Antiesclavagisme, abolitionnisme et lutte contre ‘l’aristocratie de l’épiderme - Défense de l’ordre racial et esclavagiste et Contre-révolution) et se termine par Violences et guerres coloniales).

Les intitulés de ces têtes de chapitres en disent long sur le parti pris de l’auteur et l’idéologie qui est sous-jacente dans ses développements. Cette orientation, partagée par un nombre croissant de chercheurs et d’académiques adopte un point de vue partial visant à ne retenir de l’Histoire que les éléments à charge contre les nations occidentales accusées de tous les maux de façon sélective.

Dans son introduction, l’auteur le dit lui-même : « Cet essai est, par ailleurs, rendu nécessaire par l’extraordinaire augmentation de travaux universitaires et des recherches depuis trois décennies. En effet, l’historiographie de la période révolutionnaire… a connu un ‘tournant colonial’ depuis le bicentenaire de 1989… Aujourd’hui, le temps parait lointain où la question coloniale et celle de l’abolition de l’esclavage étaient, à quelques exceptions près, invisibles dans les grandes synthèses d’histoire de la Révolution. Le tournant colonial de l’histoire des révolutions est à mettre en relation avec la montée actuelle des débats suscités par les études postcoloniales depuis les années 2000…

L’objectif des études postcoloniales était de partir des réalités vécues par les colonisés et de les confronter aux représentations construites par les colonisateurs, de décentrer le regard de l’historien en étudiant la construction des identités ‘ de race’, de sexe, des identités ethniques, nationales ou impériales et surtout de rejeter le récit lié à l’idée de civilisation occidentale et l’eurocentrisme ».

L’histoire se nourrit traditionnellement de nouvelles découvertes en matière de documentation. Le phénomène de mode auquel souscrit Marc Belissa procède d’une autre démarche : la réécriture de l’histoire, sous tendue par un biais idéologique mortifère tendant à diaboliser, dans le cas d’espèce, la présence française outre-mer qui si elle n’a pas toujours été irréprochable, n’en a pas moins mérité qu’on la relate avec plus d’objectivité.