Pour un monde en commun : regards croisés entre l'Afrique et l'Europe

Recension rédigée par Serge Arnaud


Ouvrage court de 179 pages mais dense, Pour un monde en commun reflète la pensée de deux spécialistes reconnus du développement : Achille Mbembe, historien-universitaire, et Rémy Rioux, historien-directeur général de l’agence française de développement.

Ce livre est organisé selon une série de questions posées par une philosophe-chercheuse, et groupées en trois chapitres : l’Afrique et le basculement du monde, dépasser l’héritage colonial, pour une diplomatie du vivant. Ce rythme ternaire devait sûrement se décliner en ennéade dans les questions mais ces dernières ont vraisemblablement doublé passant de trois à six au dernier chapitre devant l’immensité du champ restant à couvrir.

A chaque question, il y a alternance des auteurs pour répondre. Ils convoquent de nombreuses disciplines pour étayer leurs thèses : l’histoire bien évidemment mais aussi beaucoup la philosophie. Ils donnent chacun une définition du développement, ce qui n’est pas une chose facile. Le croisement, cependant, énoncé dans le titre se résout plus à des parallèles à l’instar de Saint-Exupéry : « aimer ce n’est pas se regarder l’un l’autre, c’est regarder ensemble dans la même direction ».

Le respect mutuel et l’écoute de l’autre, comme Emmanuel Levinas l’a bien étudié, transpirent dans cet opuscule. Il faudra néanmoins penser à une convergence et passer peut-être d’une géométrie euclidienne à une géométrie riemannienne dans laquelle les parallèles se rejoignent. Une maïeutique plus poussée, chère à Socrate aurait également été intéressante pour approfondir les sujets et tenter d’approcher une vérité, celle de chaque lecteur et non un archétype comme dans la Théorie des Idées chère à Platon.

En résumé, un livre, tout à la fois humaniste et universel au sens étymologique du terme, captivant, très documenté, donnant l’état des connaissances dans le domaine ainsi que des facteurs pour progresser en toute sérénité vers cet impératif que Kant n’aurait pas renié.