Trente ans de vie politique avec Léopold Sédar Senghor

Recension rédigée par Jean Nemo


            Christian Valantin a fait, le 9 décembre dernier, la présentation de cet ouvrage à l’Académie, de façon vivante et complète. Elle figurera donc dans Mondes et Cultures.

            Néanmoins, sans attendre cette publication, et pour les consœurs ou confrères qui n’auraient pu assister à cette séance, quelques mots rapides de présentation de l’auteur et de  son ouvrage.

            Originaire de Saint-Louis, d’une famille ancienne et comme beaucoup d’autres dans cette ville anciennement métissée, Christian Valantin fut élève de l’École nationale de la France d’Outre-mer. Nul n’ignore que Saint-Louis était, à l’époque coloniale, l’une des « quatre communes » dites de « plein exercice » du Sénégal dont les habitants eurent très tôt l’essentiel des droits de citoyens français. À sa sortie de l’École, il opte pour commencer sa carrière au Sénégal, où il la mènera à son terme, quelques décennies plus tard.

            Il sera, tout d’abord et entre autres, chef de cabinet du président Senghor, alors président de l’Assemblée fédérale du Mali, puis son directeur de cabinet lorsqu’il sera président de la République du Sénégal, gouverneur de la région de Thiès, plusieurs fois député et vice-président de l’Assemblée nationale, président du Comité international de suivi du sommet de la francophonie (on sait le rôle essentiel du même Senghor à l’occasion de ce sommet), représentant du Président Abdou Diouf à la Francophonie, qu’il rejoint ensuite à l’Organisation internationale de la Francophonie.

            Ce CV simplifié pour indiquer que l’ouvrage n’est pas le fait d’un historien universitaire ni une chronique de journaliste ou encore une biographie savante : il s’agit ici d’un témoignage engagé, celui d’un homme que son personnage, son mentor, a profondément influencé. Comme le dit le préfacier, le philosophe Souleymane Bachir Diagne, le « petit paysan sérère » a été le maître à penser de « l’homme des comptoirs ».

            En quelques courts chapitres, l’élève retrace tout d’abord le parcours de son maître dans ses premières années, celles qui le conduisent de la case natale au collège puis à Paris, Normale Sup, la naissance de la négritude de célèbre mémoire, les influences du surréalisme ; il le croise brièvement avec le sien propre, plus « classique », de bonne famille, à Saint-Louis.

            Suit l’évocation du passage du maître de l’univers culturel qu’il a profondément marqué, avec deux ou trois autres, de sa revendication d’une négritude analogue à d’autres cultures et qui leur est égale, à la vie et à l’engagement politique d’après-guerre. Et comment le jeune lycéen de quinze ans comprit que l’assimilation devait être dorénavant doublée de l’association.

            Puis viennent la période d’autonomie interne, les résistances d’une partie des partis métropolitains et les tensions qui les accompagnent, la démission de Senghor de la SFIO alors qu’il continue à se réclamer du socialisme. Les échecs des fédéralistes africains, dont Senghor. Là encore s’entrecroisent les  souvenirs personnels et la vie politique telle que dirigée par le mentor et sans le succès fédéraliste escompté.

            Le témoignage se poursuit, toujours entrecroisé,  par la description de ce que furent les premières années d’indépendance et de la naissance d’un socialisme africain, très différent du marxisme à l’africaine proclamé ailleurs. Et enfin, le départ volontaire du pouvoir et sa passation sans drame au successeur, exception majeure en Afrique.

            Pour terminer, Senghor et la culture et plus particulièrement Senghor et la francophonie.

            Des biographies plus méthodiques et plus complètes de Senghor existent, des histoires et des analyses des vies politiques africaines ne manquent pas. Le prix de cet ouvrage particulier : le témoignage du disciple, de l’un des disciples, ou comment une vie personnelle et professionnelle fut marquée par la philosophie qui sous-tendait la politique telle que pratiquée par le mentor.                                                                                                              

 



 
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