Les passeurs de livres de Daraya : une bibliothèque secrète en Syrie

            Delphine Minoui est grand reporter au Figaro, elle réside à Istanbul. Vivant en lien étroit avec le déroulement de tous les drames du Moyen-Orient, et tout particulièrement de ceux qui affectent la Syrie, elle nous livre dans cet ouvrage un témoignage poignant de l’espoir qui peut subsister dans une situation sans issue.

            Les faits se déroulent dans une ville proche de Damas, libre, opposée au régime Syrien, restée aux mains de l’armée syrienne, à la période où ses forces reprennent progressivement et dans la plus extrême violence le contrôle de ce quartier rebelle. Les combattants sont en communication directe par les moyens variés des réseaux sociaux avec une journaliste et c’est elle qui s’exprime dans cet ouvrage en racontant cette aventure.

            Ces jeunes soldats de fortune vont découvrir dans les immeubles éventrés par les bombardements, symboles de la barbarie, des livres abandonnés, dispersés, maculés parfois. Leur passion va alors se fixer sur un but, rechercher, collecter, rassembler puis mettre à la disposition de tous ce butin, en créant une bibliothèque qui va demeurer, jusqu’à la chute de ce quartier de Daraya, le refuge et l’esprit partagé de ces jeunes combattants.

            L’absence de certains titres, la recherche du Prince de Machiavel illustrent bien qu’une passion autre que celle des combats en dépassant cette douloureuse défaite, est née, grâce à cette bibliothèque créée miraculeusement et préservée jusqu’à la fin. La culture dans toutes ses acceptions sort immaculée de cet ouvrage, elle triomphe en quelque sorte des deux camps rivaux.

            Je ne puis conclure sans mettre en parallèle dans ce Moyen-Orient déchiré le courage de ce prêtre qui sauva tous les livres et manuscrits des églises de Karakoch de la destruction programmée par Daech. Les livres, la pensée, l’esprit témoignent dans les deux cas d’un espoir et d’une fidélité éthique proprement humaine.