Auteur | Benoît Mafféï |
Editeur | Droz |
Date | 2021 |
Pages | 496 |
Sujets | Relations internationales 20e siècle Pétrole Aspect politique |
Cote | 64.111 |
Cet imposant ouvrage de 500 pages se donne pour objet d’examiner la part des enjeux pétroliers dans le déclenchement et le déroulement d’un certain nombre de crises ou conflits survenus dans le courant du XXème siècle. Il a l’ambition de décrire les relations internationales à travers ce prisme, en transgressant ce que l’auteur estime être un tabou et en échappant à tout déterminisme.
L’auteur, directeur de recherche à l’EDHEC, après des considérations générales sur le secteur pétrolier, établit une typologie des guerres du pétrole en fonction de la part de responsabilité du pétrole dans les conflits considérés.
Son approche est géographique dans sa présentation et historique dans la prise en considération des conflits. Quatre parties composent l’ouvrage : l’Amérique Latine, l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Eurasie. De nombreux conflits sont analysés, de la révolution mexicaine à la guerre contre l’Iraq en 2003. S’aidant de plusieurs disciplines : l’histoire, la géographie, la sociologie, la psychologie, l’auteur examine chacun de ces conflits afin de démontrer que son approche est validée : « l’appropriation des ressources rares est par nature belligène », souligne-t-il, et la responsabilité du pétrole dans les crises analysées est avérée et déplace les limites des approches géopolitiques traditionnelles. Le style est plus journalistique que scientifique, malgré des emprunts au vocabulaire scientifique, et rend la lecture facile. La description des crises est adaptée aux caractéristiques de chacune d’elles, sans effet de répétition.
L’auteur a choisi une approche analytique en s’appuyant sur de solides connaissances historiques et techniques sur l’industrie pétrolière. Certains passages ou jugements appellent cependant un débat. La présentation des compagnies pétrolières en deux catégories « super-élite » et « élite » interroge par exemple, surtout en rangeant l’Aramco dans la deuxième catégorie. De nombreux tableaux de production pétrolière figurent dans le livre, par pays. Il aurait sans doute été intéressant de prendre en considération les productions par compagnie, pour s’apercevoir que, contrairement à une idée reçue, la production des majors internationaux est beaucoup plus faible que celle des compagnies nationales. Le gaz est seulement mentionné, alors qu’il devient une énergie dont la croissance est forte. Le gaz est essentiel pour le Qatar par exemple, avec une production de GNL considérable, ce qui lui donne un statut politique et économique important, bien au-delà du Moyen-Orient.
La thèse défendue par l’auteur n’est sans doute pas nouvelle. La proportion de la composante politique dans le pétrole a toujours été considérée comme supérieure à son contenu énergétique. Mais le mérite du livre de Benoît Mattéï est de livrer une analyse systématique des principaux conflits depuis plus d’un siècle où la responsabilité du pétrole est significative, quoique souvent partielle.
Deux annexes et trois index complètent l’ouvrage. Dans la bibliographie, on peut sans doute regretter que les livres de Dan Yergin ne soient pas mentionnés, alors qu’ils sont de solides références, notamment The Prize.
Dans une ultime interrogation sur l’avenir des guerres du pétrole, l’auteur estime que l’après-pétrole sera violent, du fait de la disparition de la rente et de l’incertitude relative à la mise à disposition généralisée de ressources énergétiques renouvelables. Cette question, selon l’auteur, pose la question de l’avenir même de l’humanité. L’absence de pétrole - dans quel délai ? - ne fera donc pas disparaître les conflits.
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