L'empire britannique en guerre, 1857-1947

Recension rédigée par Dominique Delort


C’est la première fois qu’un historien français dresse une fresque aussi large de l’expansion puis du déclin de l’Empire britannique à travers les engagements militaires de son armée de Terre et de la marine Royale. Philippe Rondeau est un historien confirmé qui cette dernière décennie a publié de nombreux ouvrages sur la deuxième Guerre mondiale mais aussi sur les combats des légions romaines. Dans ce livre, l’auteur a choisi volontairement le premier accroc dans la poussée finale du plus grand empire de l’histoire. Elle débute avec la révolte des cipayes, premier indice de la fragilité du contrôle britannique sur le sous-continent indien. Il était nécessaire de présenter le soldat et le marin de l’Empire à l’époque victorienne. La construction de cette relativement petite armée se fonde sur la géographie des royaumes britanniques pour les régiments, les classes sociales pour le commandement. L’expansion se poursuit en Asie, en Afghanistan et en Afrique avec de nombreux échecs tactiques mais toujours une victoire finale.

Dans une deuxième partie, l’auteur nous décrit les célèbres et très dures guerres contre les Zoulous, la pénétration et le contrôle de l’Égypte et les difficiles guerres au Soudan. Le rôle des officiers britanniques envoyés pour contrôler ou en tout cas influencer les chefs locaux est mis en évidence. En cas d’échec des supplétifs locaux, les forces britanniques sont appelées à la rescousse. Signe de l’évolution politique et idéologique, la guerre des Boers est le fruit sanglant d’une contestation par une population blanche en Afrique du pouvoir de la Reine. La suprématie britannique finit toujours par se manifester mais que d’efforts financiers et de pertes humaines ! Ailleurs, l’Union Jack flotte toujours un peu plus en Asie.

Dans une troisième et dernière partie, l’auteur traite des guerres mondiales et du crépuscule impérial. Les armées britanniques sont généralement accompagnées des troupes venant des colonies. En fonction des théâtres d’opérations, celles-ci sont majoritaires et déterminantes. Ces guerres du XXe siècle sont mieux connues des lecteurs que les engagements coloniaux du XIXe, néanmoins dans cette dernière partie comme dans les autres, l’auteur a le mérite de faire apparaître des personnalités militaires ou civiles les plus importantes.

L’immense Empire va disparaître sous sa forme initiale avant les empires français, belge, portugais et peu après les empires allemands, hollandais, espagnol, japonais et américain. L’intérêt réel de ce livre écrit par un Français est de décrire sans fard les forces et faiblesses de la super puissance du XIXe siècle à travers ses engagements militaires multiples, permanents et se déroulant sur une grande partie de la surface du globe. Comme l’écrit Philippe Rondeau : « la grande phase de l’impérialisme avait commencé en 1857 avec la répression de la révolte des cipayes et elle s’achève en 1947, au même endroit, en Inde, qui fut considérée comme la perle d’un empire presque continuellement en guerre. »

Ce livre, riche et précis, se lit facilement et contribue réellement à une meilleure connaissance des guerres impériales. La puissance politique britannique suivit une longue courbe ascendante qui sembla trouver son apogée vers 1900 avant de s’écrouler presque entièrement. Mais la transformation de l’Empire en Commonwealth sauva une partie du prestige de nos voisins.

En conclusion, ce livre, qui couvre un siècle de luttes, exprime aussi le tragique du destin des empires bâtis sur le sang et l’honneur de leurs soldats, sans pour autant oublier la mort de leurs ennemis et de nombreux civils impliqués dans ces multiples affrontements.

Beau livre très documenté.