Il est dit, à la fois dans le catalogue de la BnF et dans les premières lignes de l’introduction (signée des deux directeurs) que le présent ouvrage est fait de « contributions issues du colloque international éponyme organisé du 13 au 16 novembre 2013 à Fort-de-France ». L’introduction précise que le thème du colloque, le même que celui de l’ouvrage collectif, « en prolonge aussi la réflexion et repose la question de savoir comment la révolte constitue le noyau central pour penser à la fois Albert Camus et Aimé Césaire ».
On notera que 2013 correspond au centenaire de naissance des deux « révoltés », ce qui explique que d’autres « révoltés » sont absents. On verra néanmoins que, tel Frantz Fanon, ils sont dans l’ouvrage appelés à la barre.
Donc ni actes de colloque, ni rassemblement des communications qui y furent faites, mais ici poursuite de la réflexion. Dans quelle mesure cette poursuite développe cette réflexion ? Impossible de le savoir car aucun acte proprement dit du colloque n’est accessible.
Remarque sans grand intérêt dans le cas présent, car l’ouvrage se propose de regrouper ses contributions en fonction de cinq thématiques : la mythologisation de la révolte, la philosophie de la révolte, l’histoire de la révolte, l’idéologie de la révolte, le langage de la révolte.
Certaines de ces cinq thématiques peuvent paraître un peu artificielles, au moins dans leurs intitulés. Quelle différence exacte entre « philosophie » et « idéologie » ou « mythologisation » ? Mais acceptons cette « catégorisation », car s’y insèrent dix-huit contributions qui sont autant d’essais au sens propre du mot et qui ne traitent que de questions spécifiques, par conséquent non exhaustives, encore moins synthétiques. Aucune notation désagréable dans ce constat, c’est la règle du jeu dans une réflexion en train de se faire.
Comme il est d’usage dans cette réflexion en cours, le lecteur trouvera dans l’introduction des lignes directrices.
La première : «…dans le discours porté par ces deux auteurs, la révolte passe d’abord par le refus de l’oppression et l’affirmation de la dignité et de la liberté ». Puis viennent l’examen des parcours intellectuels et des héritages des deux « révoltés », les relectures et l’esthétique de ladite « révolte », sa réception, les débats qu’elle suscite, leurs prolongements artistiques.
L’introduction se termine ainsi : « La révolte se nourrit du milieu, de l’histoire différenciée et en héritage, dans la production d’une culture multiforme. La révolte est source d’enjeux et trouve des prolongements chez d’autres artistes. Il y a donc plusieurs révoltes et chez Camus et chez Césaire, objets de cet ouvrage. »
Nul ne doute que Césaire et Camus expriment dans leurs écrits, chacun à sa façon dans des environnements très différents, de la révolte. Le premier, l’un des fondateurs avec Senghor, de la négritude, revendication anticolonialiste. Le second, notamment avec « La peste », plus symbolique mais calme révolte contre un destin dramatique et incompréhensible.
Nul ne doute non plus que ces deux révoltés ont été adoptés par les non révoltés, reconnus par le Nobel ou par les élections. Profond sujet de méditation proposé au lecteur : qu’est-ce qu’une révolte reconnue et qui porte les révoltés au faîte de la gloire ? Tout en les maintenant dans leur statut de révolté ? Mais laissons-là ce genre de considération pour en revenir à l’ouvrage collectif.
Une remarque éditoriale : dans un ouvrage de cette nature, il est de coutume de rédiger une courte notice à propos de chaque contributeur, elle manque ici ! De même, si figure en fin d’ouvrage une bonne bibliographie, aucun autre appareil critique n’est ajouté.
Sur le fond : l’ensemble des contributions est fort intéressant. Pour le lecteur désireux de considérations intelligentes et raisonnablement informées sur deux esprits « révoltés », reconnus comme tels, l’ouvrage est à conseiller, même si, ici ou là, mais c’est de bonne règle intellectuelle et cultivée, le lecteur aura des commentaires à faire…mais pas de « révolte » à exprimer.
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