Colonialisme ou impérialisme ? : le parti colonial en pensée et en action

            Cet ouvrage ne se présente pas comme un travail de synthèse définitive, mais plutôt, selon l’expression même de son auteur, comme « l’ébauche d’un travail plus vaste », consacré aux décideurs de la politique coloniale française aux XIX^e et XX^e siècle. Les acteurs sont classés en trois parties : « les doctrinaires » (170 p.), « les politiques » (180 p.), les militaires (50 p.). Les deux premières parties consistent en deux séries de notices biographiques qui contribuent à reconstituer le réseau de ce qu’il fut accoutumé de désigner comme le « parti colonial » (il faudrait plus précisément parler de « lobby colonial ») français sous la
III^e République, essentiellement, mais non exclusivement, avant 1914. La troisième partie, consacrée aux militaires, se veut plus synthétique. On pourrait lui reprocher de ne pas englober de marins, comme l’amiral Jauréguiberry, mais l’étude de ministres de la Marine comme Deschanel remédie à cette absence.

            La liste n’offre guère de surprises pour les connaisseurs de l’histoire de la France coloniale (de Paul Dislère à Robert de Caix pour les doctrinaires, de Gambetta à Albert Sarraut pour les politiques, de Bugeaud à Lyautey pour les militaires). En revanche, la richesse de la documentation précise et renouvelle un genre biographique trop longtemps adonné à l’hagiographie tandis que l’inscription de chaque notice dans un projet d’ensemble permet de souligner la persistance des problématiques. Chacun des dix-neuf chapitres est suivi d’une bibliographie très complète, qui englobe les références du temps et les travaux actuels, en français et, de plus en plus, en anglais. Une grande place est faite à la littérature périodique des années 1870-1920, trop souvent négligée, et que l’auteur a contribué à mieux faire connaître par des recensions accomplies sous sa direction à partir des fonds des bibliothèques du ministère de la Défense, recensions mises en ligne pour la plupart. L’auteur porte un jugement nuancé sur le rôle du parti colonial, dont il estime que l’influence, réelle, fut certes importante, mais guère durable. La place de l’Algérie, en particulier à l’initiative d’Eugène Étienne, est présentée, non sans arguments, comme centrale dans le développement d’une stratégie impériale.