Auteur | Bernard Lugan |
Editeur | du Rocher |
Date | 2021 |
Pages | 214 |
Sujets | Égypte Histoire |
Cote | 63.752 |
L’auteur, né à Meknès, est un historien français, africaniste de spécialité. Il enseigna à l’Université nationale du Rwanda, puis fut maître de conférences à l’Université de Lyon 3. Il dispensa également des cours à l’Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN), à l’École de guerreet à l’École spéciale militaire de Saint-Cyr. Il est l’auteur d’une quarantaine d’ouvrages, dont beaucoup d’études historiques sur l’Afrique. Il reçut en 1988 le prix Louis-Marin de l’Académie française pour son livre Huguenots et Français, ils ont fait l’Afrique du Sud.
Le livre dont j’ai l’honneur de faire une recension est à la fois généraliste et précis. Généraliste car la narration commence vers - 16000 / - 13000 ans avant notre ère (période d’hyperaridité qui entraîna les premières concentrations humaines dans la vallée du Nil), pour s’achever en avril 2019 (quand les Égyptiens adoptèrent une nouvelle constitution). Ainsi, comment traiter, en un seul livre, tant de périodes historiques sans demeurer dans le général ? C’est un reproche qu’un spécialiste de telle ou telle période, avide d’informations nouvelles et d’analyses lumineuses, pourrait légitimement adresser à l’auteur. Toutefois, à la lecture, on s’aperçoit que le contenu reste précis et documenté, et donc utile pour celui qui cherche à saisir une longue histoire dans toutes ses phases, différentes mais in fine liées. Ici réside donc la prouesse de l’auteur : avoir réussi à retracer les grandes lignes d’une histoire très longue, avec minutie, en en montrant les continuités.
Le chapitre I traite des changements climatiques et de la naissance de l’Égypte, jusqu’à - 3000 avant J-C. (fin de la période protodynastique). Le chapitre II est consacré à la période dynastique : - 3200 / - 1078 avant J-C. Le chapitre III de - 1078 à - 332, avec la conquête d’Alexandre. Le chapitre IV des Ptolémées à la veille de la conquête arabe, soit de - 323 à + 642. Le chapitre V aborde la conquête arabe et les débuts de l’islamisation, jusqu’au milieu du XIIIe siècle, avec la fin de la dynastie ayyoubide (Saladin). (C’est à partir de cette période que l’auteur de ces lignes commence à avoir quelques notions, qui remontent à sa formation universitaire.) Le chapitre VI est consacré aux Mamelouks, soit de 1250 à 1798. Le chapitre VII traite de la présence française, brève (1798-1801) mais influente. Le chapitre VIII aborde le règne de Méhémet Ali et de ses descendants (les khédives), jusqu’à la conquête britannique de 1882.
Le chapitre IX va de 1882 à 1945, période compliquée avec les luttes (et les retournements d’alliances) entre le colonialisme britannique, la monarchie égyptienne et le mouvement nationaliste naissant (Saad Zaghloul et le parti Wafd), sans compter les conséquences de la Première guerre mondiale (indépendance - formelle - de l’Égypte en mars 1922, traité en août 1936) et de la seconde (soutien des nationalistes aux Alliés ou à l’Axe). Le chapitre X concerne 1952-1981, soit le coup d’État des Officiers libres, la présidence de Nasser (nationalisme arabe, lutte contre le colonialisme, socialisme, non-alignement, guerre de 1967), puis le règne de Sadate (ouverture économique, guerre de 1973, normalisation avec Israël).
Le chapitre XI concerne la période contemporaine : de Moubarak à Sissi, deux généraux. Les causes du renversement de Moubarak (février 2011) sont bien expliquées, de même que la suite des événements : la reprise en main de la situation révolutionnaire par les militaires, la présidence islamiste de Mohammed Morsi (élu démocratiquement puis très contesté), le coup d’État (juillet 2013) de son ministre de la Défense, devenu président. Les aléas électoraux et constitutionnels sont bien expliqués, de même que les conflits de pouvoir (symbolique et matériel). Le livre se termine par deux annexes : sur l’origine génétique des Égyptiens, et sur la crise autour de la répartition des eaux du Nil. Vient ensuite une bibliographie (mais non classée par périodes) et un index des noms de personnes, deux éléments utiles qui montrent le sérieux du travail.
Pour conclure, cet ouvrage est d’une lecture agréable, avec des informations documentées (et des cartes utiles), et le plan chronologique (des origines à nos jours) permet de comprendre les enjeux et défis de l’Égypte d’aujourd’hui dans une perspective historique, en particulier à travers ces questions : le poids du milieu naturel (aridité et surpopulation), l’identité du peuple égyptien (copte puis arabe), les rapports obligés avec l’environnement régional.
En quelque 200 pages, l’auteur a ainsi réussi à écrire un livre que le profane consultera avec intérêt, et auquel même le spécialiste pourra se référer.
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