Auteur | Henri Calet |
Editeur | Presses universitaires de Lyon |
Date | 2019 |
Pages | 179 |
Sujets | Afrique du Nord Récits personnels |
Cote | 62.517 |
On l’aura compris dès la page de garde, il ne s’agit pas exactement d’un ouvrage, aujourd’hui publié, ou d’une réédition (l’auteur supposé étant mort encore jeune, en 1956), mais du rassemblement de documents en partie manuscrits rédigés par Henri Calet lors de deux visites en Afrique du Nord, Algérie et Maroc, pendant l’hiver 1947-1948. On peut donc supposer sans risque que l’ouvrage en question est d’abord le fait de Michel P. Schmitt, même si la substance proprement dite est bien d’Henri Calet.
De fait, outre la préface, les deux chapitres (Algérie, Maroc), sont également introduits par ce « présentateur ». De nombreuses illustrations ou photos proviennent, pour l’essentiel, de collections particulières. Ne boudons cependant pas l’intérêt de ce recueil d’archives, rédigées en brouillons manuscrits, lors d’un manifestement court séjour au Maghreb. Il est cependant dit par la rumeur publique que pendant ce séjour, Henri Calet commencera un essai qui deviendra en 1948 «Le tout pour le tout », bien accueilli par la critique.
La vie d’Henri Calet fut fort tumultueuse. Il ne portait pas ce nom à sa naissance. Fils d’un père anarchiste, enfant souffreteux, voleur à ses heures, ce qui lui valut de fuir en Amérique latine avant de revenir clandestinement en France où ses multiples talents de littérateur, de romancier, de nouvelliste, de journaliste, d’homme de radio, d’un humour dont jamais il ne départit, lui valurent de solides amitiés avec des Jean Paulhan, des Pascal Pia, des Francis Ponge, ou des inimitiés par exemple avec Michel Leiris. Sa mort suite à des crises cardiaques (comme l’on disait à l’époque), il savait qu’elle venait et il l’attendit courageusement. Il fut presque toujours dans la gêne matérielle et connut des amours tumultueuses.
Ce trop long résumé de ce que fut cet homme a deux raisons : la première est que l’assez brève escapade en Algérie puis au Maroc n’est qu’une parenthèse dans cette vie agitée ; la seconde est que le lecteur non spécialiste de l’histoire littéraire, même cultivé, pour peu qu’il ait moins de septante ans, n’est plus forcément conscient de la place qu’occupa cet homme dans la vie littéraire, journalistique, radiophonique et culturelle de son époque.
Nous avons donc resitué ce séjour maghrébin dans les parcours compliqués d’Henri Calet. Revenons à l’ouvrage dont il est ici rendu compte.
La préface de Michel P. Schmitt résume les raisons et le déroulé de ces courts séjours en Afrique du Nord : « le Service algérien des mouvements de jeunesse et d’éducation populaire… organisa des rencontres culturelles…et adressa pour cela une série d’invitations des personnalités métropolitaines… ». Invitation tous frais payés. Ce qui n’était pas neutre pour un Calet perpétuellement dans la gêne. Des personnalités (les trois quarts, Sartre, Vercors…) ne donneront pas suite, d’autres y répondront (Ponge, Leiris, Camus…). Séjour ensuite au Maroc, plus familial (un beau-frère de Calet y résidant) mais également mis à profit pour faire passer à la radio des transmissions orales de certaines de ses œuvres.
Autrement dit, ces « impressions d’Afrique » ne peuvent être que celles du Maghreb, les circonstances montrent que le voyageur n’a pas rompu avec ses activités habituelles, « sans conviction particulière ». Ce qui ne l’empêche pas, dans un récit inachevé, de vouloir raconter « mes impressions d’Afrique ». Ces impressions sont celles d’un touriste, intéressé mais peu sensible à « l’altérité du monde arabo-musulman ». Ce qui ne l’empêchera pas de se constituer un « inventaire nord-africain », tel que reproduit en annexe, à vrai dire de noms de villes ou de régions, d’hommes ou d’ethnies.
L’on retiendra surtout l’intérêt porté à la personne Calet et à ce séjour par Michel P. Schmitt, par ailleurs « spécialiste des évolutions du champ littéraire des années 1930-1960… ».
L’ouvrage est riche de documents (entretiens avec Kateb Yacine, Jean Lacouture…), d’une bibliographie probablement trop succincte, et surtout de la redécouverte par les moins de septante ans, grâce à l’intérêt que lui a porté Michel P. Schmitt, d’un personnage peut-être aujourd’hui trop et injustement oublié.